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La « grande démission », une chance pour l’économie – L’édito de Philippe Crevel

LA « GRANDE DÉMISSION », UNE CHANCE POUR L’ÉCONOMIE !

La réorientation : 60% des français souhaitent se réorienter

Aux États-Unis, quatre à cinq millions de personnes en âge de travailler ne seraient pas revenues sur le marché de l’emploi après les premières vagues de Covid-19. Chaque mois, depuis le début de l’été, plus de 4 millions d’actifs américains donnent leur préavis. Les experts ont nommé ce phénomène  « Big Quit » ou « Great Resignation », la « Grande Démission » en français. Des jeunes, des seniors, des non-diplômés et des salariés les plus qualifiés décideraient d’abandonner leur entreprises pour s’engager dans une nouvelle aventure.

En France, si le nombre d’emplois a retrouvé son niveau d’avant crise, voire l’a dépassé, quelques signes prouvent que de plus en plus de personnes souhaitent changer de vie professionnelle. Le nombre d’emplois vacants augmente. Il représentait, au troisième trimestre 2021, près de 2 % de l’ensemble des emplois tous secteurs confondus. Il s’élevait à de près de 3 % dans les secteurs de l’enseignement, de l’action sociale et de la santé humaine. En 2020-2021, 1 600 enseignants ont démissionné, soit 0,2 % du corps professoral. Bien que faible, ce taux est en constante augmentation. Selon une enquête de l’Ordre National des Infirmiers du mois de mai 2021, 40 % de ses membres indiquaient que la crise leur a donné envie de changer de métier. Dans le secteur de l’hébergement et de la restauration, le nombre de salariés a, selon la Dares, diminué de 237 000 depuis le début de la crise sanitaire. Durant la période estivale, des restaurants ont peiné à trouver des cuisiniers et des serveurs. Selon une récente enquête commandée par l’UNEDIC, 60 % des Français souhaitent se réorienter professionnellement.

La crise sanitaire a bouleversé le rapport au travail

La crise sanitaire, avec ses confinements, modifie le rapport au travail et la perception qu’en ont les actifs. Elle a accentué une tendance bien présente depuis plusieurs années. Néanmoins, cette soif du « grand changement » ne s’accompagne pas nécessairement d’un rejet de la valeur travail ou de l’entreprise. Selon des études menées par l’OCDE, l’engagement des salariés qui constitue un indicateur de la satisfaction au travail, est proche, en 2021, de son niveau record. Les jeunes ne sont pas réfractaires au travail, bien au contraire. En France, selon un sondage IFOP de 2021, 80 % des salariés de moins de 30 ans se déclarent satisfaits de leur situation professionnelle contre 76 % pour l’ensemble des salariés. Trois quarts des jeunes actifs s’estiment  très fiers d’appartenir à leur entreprise. Malgré la crise sanitaire, ces derniers restent  optimistes sur l’évolution de leur carrière professionnelle (76 %, soit huit points de plus que la moyenne de la population). Toujours selon une enquête de l’IFOP, seuls 8 % des jeunes actifs percevaient, en 2021, le travail en entreprise comme une contrainte remettant en cause leur liberté d’agir.

L’adhésion des jeunes actifs au monde du travail ne se fait pas, cependant, sans exigences ou contreparties. La conciliation vies privée et professionnelle constitue, pour eux, une priorité affichée. Plus des deux tiers jugent, par exemple, déplacé et stressant de recevoir des mails en-dehors des heures traditionnelles de travail. Les cadres de moins de 30 ans exigent, de plus en plus, le respect du droit à la déconnexion. Les jeunes acceptent moins que leurs aînés les longs trajets entre le domicile et le lieu de travail. Dans leur choix d’entreprise, la proximité de lieu d’habitation est mise en avant.

Une chance pour notre économie

Si les jeunes estiment normal de se rendre au bureau ou à l’usine, ils souhaitent néanmoins le développement du télétravail. Trois-quarts d’entre eux pronostiquent son essor dans les prochaines années, avec un minimum de deux jours par semaine en distanciel. Si les annonces d’emploi « full remote » (emplois sans bureau et lien physique avec l’employeur) se développent, cela reste marginal et peu concevable pour une majorité des actifs. Ces derniers considèrent qu’une entreprise est avant tout une communauté « humaine » permettant de réunir des compétences avec comme principe l’unité de temps et de lieu. L’entreprise, lieu de travail, doit être également porteuse de valeurs. Pour une large majorité des Français, elle se doit de participer à la transformation environnementale de la société et à la réduction des inégalités. Lieu de socialisation et d’échanges, l’entreprise se doit d’accompagner leurs salariés dans la vie courante. Faire du sport dans l’entreprise ou se faire livrer des colis sont demandés par une part croissante de salariés.

Pour de nombreux Français, le changement de vie professionnelle passe aussi par la création d’entreprise qui atteint des niveaux records depuis le début de l’épidémie, plus d’un million en rythme annuel. 20 % des jeunes de moins de 35 ans souhaitent créer leur propre structure contre 12 % pour l’ensemble des salariés. Les secteurs les plus dynamiques pour la création d’entreprise sont ceux de la livraison, des transports, des techniques de l’information et de la communication, du conseil aux entreprises et de la santé.

La « Grande Démission » n’est pas un danger pour l’économie. Elle pourrait être, au contraire, une chance en contribuant à la revitalisation du tissu économique. Un plus grand nombre d’entrepreneurs prenant des risques est une source de croissance et d’épanouissement personnel. Après les années de plomb pour la zone euro, marquées par une succession de crises et une émolliente stagnation, les années 2020 pourraient se révéler bien plus enthousiasmantes que prévu avec l’arrivée tant attendue de gains de productivité issus non seulement du numérique mais aussi de la transition énergétique, défi qui se doit d’être vécu positivement.

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